Sélection qualitative – Critères précis et assortis d’un niveau d’exigence approprié
Rappel des faits
Dans le cadre d’un marché public relatif à l’enlèvement et à l’entreposage de véhicules sur le territoire et pour le compte de la Ville de Liège, l’un des soumissionnaires a saisi le Conseil d’Etat d’une demande en suspension d’extrême urgence en dénonçant, entre autres, le caractère imprécis de certains critères de sélection et, pour certains d’entre eux, l’absence d’un niveau d’exigence approprié.
Principes et dispositions applicables
L’article 65 de l’arrêté royal du 18 avril 2017 relatif à la passation des marchés publics dans les secteurs classiques prévoit ce qui suit :
« Sans préjudice de l’article 42, § 3, alinéa 1er, 2°, de la loi [du 17 juin 2016 relative aux marchés publics], les critères de sélection ainsi que les moyens de preuve acceptables sont indiqués par le pouvoir adjudicateur dans l’avis de marché ou, en absence d’un tel avis, dans les documents du marché.
Le pouvoir adjudicateur a l’obligation d’assortir chacun des critères de sélection qualitative de caractère économique, financier et/ou technique, d’un niveau d’exigence approprié, sauf si l’un des critères utilisés ne se prête pas à la fixation d’un tel niveau.
Si le pouvoir adjudicateur utilise un critère économique, financier ou technique, ne se prêtant pas à la fixation d’un niveau, ce critère doit être assorti d’un second critère de même type qui se prête à une telle fixation.
Chaque critère doit être formulé de façon suffisamment précise pour permettre de procéder à la sélection des candidats ou des soumissionnaires. »
Il résulte notamment de cette disposition que les critères de sélection qualitative doivent être rédigés de manière claire et précise afin de déterminer la manière dont le pouvoir adjudicateur entend évaluer le respect desdits critères.
Le pouvoir adjudicateur est, en outre, tenu de déterminer un niveau d’exigence approprié pour chacun des critères de caractère économique, financier et/ou technique et ce, afin de permettre aux candidats ou soumissionnaires de déterminer le niveau minimum attendu.
Décision du Conseil d’Etat
Aux termes de son arrêt n° 249.563 du 22 janvier 2021, le Conseil d’Etat a tout d’abord observé que, s’agissant de l’équipement technique requis dans le cadre du marché en cause, le cahier spécial des charges prévoyait que le soumissionnaire dispose de véhicules « adaptés à la réalisation du marché ». Le Conseil d’Etat a estimé que cette condition de sélection est formulée dans des termes qui ne paraissent pas pouvoir être considérés comme satisfaisant à l’exigence de l’article 65, alinéa 4, de l’arrêté royal du 18 avril 2017, selon lequel chaque critère doit être formulé de façon suffisamment précise pour permettre de procéder à la sélection des candidats ou des soumissionnaires.
Le Conseil d’Etat a également considéré qu’en se limitant à exiger, au titre de condition de sélection, « un nombre suffisant de véhicules adaptés à la réalisation du marché » sans en indiquer le nombre minimum, il ne paraît pas pouvoir être considéré que cette prescription satisferait à l’obligation énoncée par l’article 65, alinéa 2, de l’arrêté royal du 18 avril 2017, d’assortir le critère de sélection d’un niveau d’exigence approprié.
Le cahier des charges a, par ailleurs, énoncé que la capacité technique des soumissionnaires sera également appréciée sur la base d’un relevé, joint à l’offre, reprenant le personnel que le soumissionnaire mettra en œuvre pour réaliser convenablement le marché et assumer à tout le moins les deux fonctions suivantes : « accueillir le public et répondre aux appels téléphoniques, en assurant une permanence administrative continue dans l’entrepôt de 6h à minuit, tous les jours de l’année » et « satisfaire aux demandes de la Police locale, 24 heures sur 24, tous les jours de l’année ».
Le Conseil d’Etat a constaté que ce critère n’était assorti d’aucun niveau minimal d’exigence et que le pouvoir adjudicateur était en défaut d’expliquer en quoi la détermination du nombre voire des qualifications des membres du personnel qui seraient chargés de l’exécution du marché ne se prêterait pas à la fixation d’un niveau d’exigence approprié
Par voie de conséquence, le moyen tiré de la violation de l’article 65 de l’arrêté royal du 18 avril 2017 a été déclaré comme sérieux de sorte que le Conseil d’Etat a ordonné la suspension de l’exécution de la décision d’attribution du marché en cause.
Besoin d’en savoir plus ?
Pour plus d’informations ou des renseignements complémentaires par rapport à ce qui précède, n’hésitez pas à prendre contact avec moi. Je me ferai un plaisir de vous aider et de vous accompagner dans vos démarches. Mon cabinet est accessible du lundi au vendredi de 8h00 à 19h00 (02/896.89.10 – c.dony@avocat.be).